Peintures de papier (suite)
Il arrive que le passage du temps dans une œuvre ainsi que l’oubli qu’il impose à la sédimentation des savoirs et des savoir-faire, « transforme » le travail de l’artiste. C’est le cas pour Jean-Louis Fauthoux dont les derniers travaux sont à la fois issus d’une recherche menée depuis longtemps, et sans âge du fait de leur évidente simplicité.
Le papier seul comme peinture.
Une chronique précédente, en 2017, avait évoqué les ouvrages imprimés et les belles peintures de papiers produites presque en secret dans l’atelier de Mazères. Aujourd’hui elle s’attachera à rendre compte des papiers monochromes récents qui leur font suite, tout en s’inscrivant dans le champ du pictural de la manière la plus dépouillée et la plus simple possible.
La texture, la transparence des « marques d’eau » et des vides parlant d’eux-mêmes, le papier vierge part seul à la conquête du regard. Tout d’abord, de celui du peintre assistant à l’émergence des formes qu’il accompagne discrètement à l’aide d’outils archaïques (grilles, bouts de carton, couteaux, rubans élastiques). Puis entre en jeu celui du spectateur en face à face avec plusieurs écrans de papier suspendus, traversés par une lumière entrée en conversation avec la surface.
Rien de masqué, tout est visible : l’activité de la grille matrice du tamis, les traces laissées par les gouttes d’eau, les formes en creux qui accordent une place à ce qui continue d’exister derrière, les marges irrégulières qui disent que le papier ne peut aller plus loin… Tout confirme une activité de la matière même du papier dont l’épaisseur a varié en fonction des impacts discrets qui en ont fait vibrer l’amalgame encore frais dans les moules. La vibration comme action a suffi à faire émerger des images fantômes entre les couches, et le regard du peintre a su les capter.