Déconstruire plutôt que démolir
24 octobre 2017 - 17 heures - Un des porches de la rue d’Etigny en face du Parc du château, s’ouvre non pas sur une bonne adresse du passé, mais sur une vision d’avenir possible. L’entrée de la parcelle donne sur un chantier-atelier et, de l’autre côté d’une petite cour, sur une maison largement ouverte et lumineuse. La surprise est totale. Tout est donné en même temps : le contexte de la construction et son aboutissement. L’avant et l’après sont lisibles d’un seul coup d’œil, comme dans ces montages photographiques qui vantent les cures de rajeunissement. La maison nouvelleest le résultat de la déconstruction et du remploi des éléments de la démolition d’une partie du bâtiment d’origine comme en témoigne ce qui reste encore en l’état et qui est provisoirement utilisé comme atelier et réserve. Pour l’instant, le film n’a pas encore effacé le scénario. Ce jour-là, Raphaël Fourquemin architecte, concepteur et habitant des lieux à ouvert sa maison à un public de confrères et de curieux pour présenter son projet de construction à partir de la récupération raisonnée des produits de la démolition. Debout, devant la façade recouverte de bardeaux blonds, taillés dans des lamelles de parquet anciennes, il raconte. Très concentré sur sa présentation, il reste cependant émouvant et drôle comme lorsqu’il déclare que pour cette façade, il aura fallu « beaucoup d’huile de lin et d’huile de coude ». Raphaël Fourquemin a vécu, au sens propre, cette expérience architecturale en réalisant lui-même, parfois avec l’aide de quelques amis, l’essentiel des travaux. Il joue donc « sur son terrain » et répond à toutes les questions posées qu’elles portent sur des détails de résistance de matériaux, des parti-pris déconstruction ou même sur les enjeux écologiques de la conception. Six mois de démolition ont permis de trier, pour les être utilisés plus tard, cloisons de placoplatre, vis, fils électriques, bois de charpente, plancher, fenêtres, portes, métal des hottes de cuisine, etc… Tout n’a pas pu être exploit, mais une bonne partie des déchets de la démolition a été réutilisée dans la nouvelle construction. Attention ! « réutilisée et non recyclée » car le recyclage, apprend-on, coûte cher alors que le réemploi est gratuit.
On peut donc « construire autrement » aujourd’hui. L’évidence était tellement aveuglante qu’elle empêchait de voir ce que la visite commentée révèle. Certains créateurs et philosophes ont déjà déjà montré que la démarche de déconstruction n’est pas fatalement négative et qu’elle peut conduire à l’ouverture de possibles. C’est ainsi que cette maison (où il doit faire bon vivre) de Raphaël Fourquemin permet aussi de réconcilier des enjeux techniques, économiques, esthétiques avec la dimension écologique et solidaire à travers une aventure qui a duré trois ans.
Après la visite, Raphaël Fourquemin donne une conférence plus théorique au Pavillon de l’architecture : Déconstruire plutôt que démolir : intérêts et atouts d’une nouvelle filière. Mais son intervention au pied du mur a été déjà plus qu’éloquente.
Monique Larrouture Poueyto