L’Espace des arts en plein centre de la ville de Pau
En cette période maussade et pluvieuse de novembre, la visite du nouvel « Espace des arts », en plein cœur de la ville de Pau, procure un effet réellement vivifiant et rajeunissant. Sous cette récente appellation, deux bâtiments art déco rénovés dont les palois « redécouvrent la gémellité » associent depuis la rentrée l’École Supérieure d’Art et de Design et le Musée des Beaux-Arts. Cette récente cohabitation apparaît d’autant plus naturelle que le nouvel accrochage à l’intérieur du musée associe des travaux de jeunes diplômés avec les œuvres du fonds présentées dans l’exposition permanente. Pour tous ceux qui fréquentent le musée depuis longtemps et pour les nouveaux visiteurs, l’initiative favorise un renouvellement du regard porté sur la collection mais aussi sur la jeune création.
C’est ainsi que la salle réservée au portrait devient une sorte de panorama, succinct mais éclairant, sur la manière dont le genre a été traité dans l’histoire de l’art de la peinture à l’huile au collage contemporain qui exclut la figure du sujet au profit d’objets le représentant. Plus loin un triptyque vidéo dialogue avec d’autres formes de représentation du paysage comme celle, entre autres, de Brueghel de Velours. Et dans le grand hall central, on peut découvrir et apprécier le rapprochement entre la blancheur du linge dans la toile de Louise Abbéma ou celui des chemises du célèbre tableau de Degas avec le volume de drap empesé réalisé par un tout jeune étudiant. Cette confrontation efficace et sensible matérialise ce qui se transmet de la plasticité des formes, de la composition et du jeu avec la lumière à travers les générations.
Les références culturelles que les jeunes plasticiens peuvent mettre en œuvre dans leur création prennent sens lorsqu’ils en signalent l’importance tout en affirmant la nécessité de produire autrement pour continuer à inventer. « Un passé, un présent, un futur » ainsi qu’on peut le lire, à propos de la nouvelle école, dans Perspectives, une publication rédigée et imprimée par le groupe de deuxième année « art » pour les journées portes ouvertes et l’inauguration récente. À cette occasion, en marge des rites officiels attendus lors de ce type d’événement, les étudiants de l’ESAD avaient pris en charge la visite de leurs nouveaux locaux. Ils étaient tous là, disponibles, prêts à partager avec un public très large la satisfaction de savoir que désormais les études qu’ils avaient choisies étaient reconnues à la hauteur de l’ambition de leur projet d’avenir. Ils semblaient tous très désireux de dissiper le malentendu tenace touchant à l’enseignement artistique.
Les écoles d’art en France sont depuis longtemps de véritables laboratoires de la pédagogie qui mériteraient d’être mieux connus. Au-delà de la transmission de connaissances, elles visent à former des créateurs, c’est-à-dire des personnalités aptes à inventer des formes innovantes et actuelles. À l’ESAD de Pau, on ne trouve pas d’atelier de peinture ou de sculpture dans lequel des maîtres dispensent leur savoir, mais des larges espaces ouverts pour faciliter la communication entre tous les étudiants et le collège des enseignants qui accompagnent leurs projets. Les surfaces murales sont les plus libres possible pour faciliter l’accrochage des images peintes et imprimées ou des planches typographiques afin que tous puissent régulièrement en tester la visibilité. La bibliothèque, les couloirs, le patio, les ateliers bois et métal, photographie ou d’impression numérique, sont autant d’espaces de rencontre et d’échange car tout se discute entre ces murs. À ce jour il est évident que les locaux attribués à la nouvelle école depuis cette dernière rentrée lui donnent enfin l’outil de travail et la visibilité qu’elle mérite au bout de près de soixante dix ans d’existence.
Il faut s’en réjouir pour les 250 étudiants en art qui vivent et travaillent désormais au centre ville de Pau.