Nous faisons partie des premiers « réfugiés climatiques » européens. Notre lieu de vie et de travail se trouve contraint par des forces naturelles extrêmes (retrait-gonflement des argiles, tempêtes, inondations.) qui perturbent notre environnement et notre maison. Depuis 2022, nous sommes jetés dans une précarité matérielle et émotionnelle de ne pouvoir sereinement « habiter » le monde comme l’entend Martin Heidegger.
Nous avons cherché de l’aide. Nous nous sommes confrontés à la fin d’un monde et à l’incapacité de la société de passer le cap de la reconsidération de ses choix. Car ce que nous vivons est le résultat de choix politiques et industriels qui commencent juste à impacter : dérèglement climatique, lobby du béton et des constructions naïves des années 80 mettant en place « L’obsolescence des ruines » de Bruce Bégout, la fuite de responsabilités des assurances renvoyant à la critique de la « résilience » du peuple de Thierry Ribaud.
En tant qu’artistes, en tant qu’humains impactés, il nous semble important de porter le questionnement de la transformation du monde, des paysages, des constructions, et de porter un nouvel imaginaire. Mais aussi une révolte.
Plastiquement, nous nous plaisons à envisager une sorte de narration temporalisée, passée, présente et future sur les mécaniques physiques, matérielles, vivantes. Nos points d’encrage seront les éléments naturels présents sur notre espace nommé « Rafin » dont les significations sont « affiner » ou « guérir ». Belle invitation.
L’avenir sera certainement radieux, empli d’œuvres, d’architectures folles et de combinaisons esthétiques qui trouveront une logique dans les faits et les images du monde pensé de notre espace, comme le suggère Wittgenstein.
Ce séjour de recherche-création, fait suite à une résidence recherche de 2 mois à la Galerie BAM Projects à Bordeaux. Les productions réalisées au Bel Ordinaire seront présentées en janvier et février 2026 au CAPC de Bordeaux au sein de l’exposition Nouvelles Saisons initiée par le Centre d’Architecture arc en rêve. Nous remercions ces trois structures, fondamentales dans le paysage de l’art contemporain et de l’architecture actuelle de Nouvelle-Aquitaine, de se saisir avec nous de ces questionnements aigus.
Béatrice Darmagnac P/O le studio_df_artdesign