Je dois avoir à peine deux ans lorsque j’entre dans ma première grotte. Elle est identifiée sous un numéro spéléologique, alors on l’appelle le Gouffre. Je me souviens de la fraîcheur du noir, la tête penchée au-dessus des abîmes où mon père s’enfonce. C’était vraiment curieux cette sensation de le voir disparaître dans l’obscurité d’une caverne alors que j’en sortais quelques mois auparavant. Je découvre sans doute cet été là, cette sensation lumineuse que l’œil perçoit dans les profondes obscurités.
Près de quarante ans plus tard, à la suite de longues recherches à propos d’une île oubliée du Pacifique, sous les cinquantièmes hurlants, je navigue près du Horn où je découvre les cendres Yaghans enfouies sous la terre, dernières ruines d’une société déchue. Les mondes invisibles sont ici et là, imbriqués entre le réel et l’imaginaire, le dessus et le dedans, entre ce qui est encore rêvé et ce qui reste à réaliser.
Les Mondes invisibles est un projet pluridisciplinaire dont l’aboutissement est la création d’un corpus d’œuvres plastiques protéiforme et la composition d’un récit original (texte de fiction). Mes recherches porteront sur les routes ancestrales empruntées par Sapiens, les mythes fondateurs et les représentations préhistoriques disséminées sur la planète, vestiges flamboyants d’une connaissance oubliée.
Pour réaliser ce projet, je compose une résidence itinérante qui se déroule de la Vallée de la Vézère jusqu’en Sicile en passant par Altamira en Espagne, ponctuée de différentes étapes comme à Pau, Hendaye, Niaux ou Marseille. Ce projet entremêlera des histoires de chercheurs et d’artistes de la nuit des temps à nos jours en explorant des interstices immémoriaux remplis de récits du Monde.
Les Mondes invisibles compte aujourd’hui une dizaine de partenaires dont le Musée national de Préhistoire, l’Agence Culturelle Dordogne-Périgord et Nekatoenea. Le projet est également lauréat de la bourse Créations, coopération et territoires, portée par le réseau Astre et financé par la Drac et la Région Nouvelle Aquitaine.