Lors de cette résidence au Bel Ordinaire, je prévois de démarrer une nouvelle série de peintures sur Billère et ses environs.

Comme une pseudo scientifique découvre un nouveau lieu, une nouvelle civilisation, portée par la curiosité et animée d’un sentiment bienveillant envers les hommes et femmes qui habitent leur lieu, je vais prendre des photographies, archiver des images, écrire des poèmes, réaliser des peintures acrylique de mon expérience intime dans la région. Mon regard se porte automatiquement sur ce qu’il y a de poétique dans ce qui est « nul » dans tous les sens du terme. Comme le titre Jankélevitch, le je-ne-sais-quoi et le presque-rien, et je rajouterais le pas tout à fait, me passionnent. Je partage avec lui cette ironie bienveillante présente aussi chez Jacques Tati dans sa filmographie ou Félix Vallotton dans ses peintures.

L’homme est infiniment grand par rapport à l’infiniment petit et infiniment petit par rapport à l’infiniment grand ; ce qui le réduit presque à zéro, — Jankélévitch.

Après ma résidence, juillet 2021

Le projet initial était très simple : j’allais travailler sur ce qu’il y a de perfectible, les petites et grandes choses qui sont presque biens ou presque nulles dans les environs du Bel Ordinaire. J’allais faire des photographies, écrire et éventuellement, commencer une série de peintures. Ces deux semaines ont apporté bien davantage.

Jusqu’ici je n’avais fait que des résidences de production qui comprenaient forcément un temps de recherche, mais celui-ci était comprimé par l’urgence de produire et de montrer.

Au Bel Ordinaire, j’ai eu du temps et un accompagnement technique pour mettre en œuvre mes idées. Depuis la reprise de ma production il y a 4 ans, je pense en terme d’image : je prends des images, j’en produis de nouvelles avec de la peinture acrylique, ou je les imprime pour quelles deviennent des papier-peints, je les retravaille pour enlever des ombres, pour amplifier une perspective, pour écraser une forme.

Ce temps de résidence m’a permis de réfléchir au support de ces images, à leur forme, à leur matérialité. Pourquoi ne pas tordre le support au lieu de tordre l’image, contraindre l’image à son nouveau cadre, la tronquer, pourquoi ne pas peindre sur du bois, comment mettre en valeur cet objet et le sujet représenté ? Toutes ces questions ont pu être expérimentées matériellement et ouvrent ma pratique picturale vers une approche plus hybride : entre l’image peinte et la peinture objet.

Merci !